samedi 7 janvier 2017

Un bailleur de fonds étranger fait la pluie et le beau temps en Tunisie ...contre toutes les réglementations nationales





C'est l'histoire d'un financement à des taux « exceptionnels » et soit disant « non-conditionné » qui perdure et tourne au bras de fer avec l’Etat tunisien depuis 2013. Il a connu son épilogue avec la conférence "Tunisia 2020", mais à quel prix ?

Il s'agit d'un crédit japonais du bailleur de fonds JICA pour des projets agricoles, de dessalement et d’une centrale électrique de la STEG.

Ce bailleur de fonds commence par imposer à la STEG la réécriture de son cahier des charges pour la Centrale électrique à cycle combiné de Rades C selon ses directives.

Cette réecriture retarde le lancement de l’appel d’offres d’une année et met la STEG sous pression pour éliminer toutes les bombes à retardement glissées entre les lignes pour favoriser le seul fournisseur japonais Mitsubishi.
La tension monte entre les responsables de la STEG et JICA qui arrive quand même à miner les conditions de l’appel d’offres par des spécifications techniques ouvertes à des interprétations et non factuelles.

Le dossier est lancé officiellement en 2014, les fournisseurs de renommée internationale, habitués à la réglementation tunisienne des marchés publics et aux dossiers STEG, posent leurs questions concernant le financement  japonais et ses contraintes. Ils reçoivent par écrit la confirmation officielle que le crédit est non-conditionné aux seuls fournisseurs japonais.

Après des mois de préparatifs, les offres des quatre fournisseurs ; l’américain (General Electric), l’italien (Ansaldo Energia), l’allemand (Siemens) et le japonais (Mitsubishi) sont remises et ouvertes en public en présence des représentants de la STEG, de l’Etat tunisien et des fournisseurs. 
Seules les performances techniques sont annoncées ainsi que les documents d’acceptabilité administrative.

Selon la procédure JICA imposée à la Tunisie, les prix ne seront ouverts qu’après l’évaluation technique et la vérification de la conformité aux conditions du cahier des charges.

La commission d’évaluation de la STEG, indépendante et souveraine, est soumise à la pression du bailleur de fond japonais sur chaque critère. 
La STEG finalise son rapport après des mois de tergiversations et déclare tous les fournisseurs conformes techniquement et demande l’accord du ministère de l’énergie et de JICA pour procéder à l’ouverture publique des prix et la clôture de l’évaluation technico-commerciale.

La procédure est alors stoppée pour de longs mois par JICA qui demande l’élimination pure et simple de tous les fournisseurs pour non-conformité technique et de retenir seulement Mitsubishi, seul participant japonais.

Selon la réglementation des marchés publics, un appel d’offres avec un seul participant est systématiquement déclaré infructueux et relancé avec des conditions permettant de faire jouer la concurrence.

JICA impose alors ses conditions et arrête tout le financement, irrigation et dessalement aussi, jusqu’à clarification du dossier de la centrale électrique de Rades.

Toutes les instances du moment s’opposent au diktat de JICA et menacent d’annuler l’appel d’offres et de chercher un autre financement pour la centrale. JICA menace alors d’arrêter son crédit.
La STEG, le ministère de tutelle, le ministère de la coopération internationale, le chef du gouvernement et la commission supérieure des marchés soutiennent la STEG dans son choix souverain.

Le ministère de la coopération internationale parrain du crédit cherche alors à trouver un compromis.
Des échanges de courrier et des visites de part et d’autres et des réunions pour lever le différent sont organisées, y compris au Japon.
Les responsables de la STEG, mis sous la pression de lobbys extérieurs afin d'imposer l’avis des japonais, défendent la souveraineté de leur décision en toute transparence.

Un dernier compromis est proposé à JICA pour annuler le dossier et le négocier directement avec Mitsubishi selon la réglementation des marchés publics en gré à gré.
Cette proposition est aussi  rejetée par JICA qui maintien sa position.

Mi-2016, le statu-quo persiste et le blocage est total. Commence alors une action de lobbying auprès des politiques et de l’Assemblée des Représentats du Peuple (ARP) et la chasse aux sorcières contre des cadres de la STEG.

La validité des offres arrive finalement à échéance ainsi que celle du financement japonais.
La STEG demande à tous les fournisseurs de maintenir leurs offres jusqu’à mars 2017, ceux-ci y répondent favorablement. JICA proroge la validité de son financement en conséquence.

La nomination du nouveau gouvernement Chahed et les préparatifs de la conférence des investisseurs 'Tunisia 2020' relance le dossier.
Mme Cheikrouhou fraîchement nommée ministre de l’énergie et, ayant un carnet d’adresse conséquent auprès des décideurs japonais et coréens, est mandatée pour solliciter la participation des bailleurs de fond de la région.
Elle se trouve confrontée au dossier JICA et promet une issue favorable aux japonais.

La machine est alors mise en marche pour trouver une solution qui satisfait les japonais et qui contourne la réglementation des marchés publics et les instances de décision.

Une solution miracle est sortie du chapeau; les conventions internationales prévalent sur les lois du pays et les conditions du financement japonais de JICA dépassent toutes les réglementations en vigueur.
Ceci est proposé en conseil des ministres et approuvé et annoncé discrètement lors du 'Tunisia 2020' au grand dam des fournisseurs surpris et désabusés ainsi que les cadres de la STEG.

L'ordre est donné à la STEG de procéder à l’ouverture du plis financier du seul fournisseur japonais Mitsubishi qui est invité la semaine des congés de Noël et le tour est joué !
Tous les autres fournisseurs sont disqualifiés techniquement sur la base d’un critère sans aucune importance pour favoriser le fournisseur japonais.

Les nouvelles allant vite, tous les fournisseurs éliminés se trouvent devant un choix difficile, comment continuer à travailler sur des projets soit disant transparents alors que les décisions sont prises au niveau politique sans aucune transparence.

Toutes les procédures officielles seront dorénavant mises en doute

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